Vis ma vie de végane dans un campement du Sénégal – Acte 1

On dit souvent qu’être végane c’est un frein à la vie en société.

Que ça n’encourage pas les collègues ou les amis à inviter à manger.

Et patati et patata.

Moi au contraire, je trouve que c’est un énorme moyen d’ouverture et de communication, à partir du moment où les hôtes sont bien informés en amont de la situation et qu’en tant que végane je prends les devants.

Pendant les fêtes de Noël, je suis partie me ressourcer dans le magnifique Siné Saloum, cette belle région du sud de la Petite Côte du Sénégal entre les fleuves Siné et Saloum.

Quel bonheur de pouvoir enfin m’extraire du tumulte et de la pollution de Dakar et de me retrouver au milieu de la nature…

Pour la toute première fois de ma vie de végane, j’allais me rendre dans un campement, totalement dépendante de la nourriture offerte par la maison.

Même si le séjour n’était que de deux nuits, j’avais pris soin de contacter les patrons afin de leur préciser mon régime alimentaire comme proposé sur leur page internet.

« Pas de viande, pas de crustacés, pas de produits laitiers, vous pouvez prévoir des plats à base de légumes, de niébé (haricots à œil noir qu’on trouve à foison ici au Sénégal), pâtes etc… ».

Comme je le fais systématiquement, j’ai glissé dans ma valise mon kit de survie : noix de cajou, dattes et tablette de chocolat noir 85 % (en cette période il ne fait pas aussi chaud au Sénégal!), et quelques végétranches rapportées de France par ma gentille maman.

Le premier soir, alors qu’on rejoint les grandes tablées, je me demande bien ce qu’on nous a concocté. De nature septique j’interroge la patronne qui me rétorque « normalement ça devrait aller ! ».

Voilà qu’on nous apporte le premier plat… il s’agit d’une macédoine de légumes enrobée de mayonnaise!

Face à ma mine déconfite, le patron vient à notre table s’enquérir. Finalement il nous fera des pâtes aux légumes (bah qui est très bien) mais pas sans s’adonner à des blagues anti-véganes douteuses du genre « bah alors tu les trouves où tes protéines?! », « tu vas pas aller loin avec tes légumes », j’en passe des vertes et des pas mûres.

Pour le dessert nous aurons droit à de la bonne pastèque pendant que les autres clients auront moults pâtisseries pas si digestes que ça.

Durant le petit déjeuner, je dois dire que mon kit de survie n’aura jamais autant bien porter son nom…

Sur la table trône une boîte vintage de Frosties de Kellogs (vous savez les corn flakes ultra sucrés), des yaourts, du beurre, de la confiture (ouf), du jus orange (j’ai pas dit du jus d’orange hein), du pain et du café.

Mais où sont les fruits ? Hahaha mystère et boule de gomme !

Bien décidée à faire de mon véganisme un prétexte pour manger équilibré, je demande au responsable de table, s’il veut bien m’apporter des fruits en remplacement des yaourts.

J’ai alors droit à une banane, une pomme (c’est ni local ni bio mais on chipote pas!) et un bout de pastèque. Youpie ! Il ne m’en faut pas plus pour me faire une salade de fruits express à laquelle j’ajoute quelques dattes, des noix de cajou et des pépites de chocolat, arrosé d’une tasse de kinkéliba (tisane locale), voilà qui me suffit pour être heureuse.

Après deux jours de pâtes non stop, je vais directement en cuisine demander au chef s’il n’est pas possible de nous préparer un ragoût de niébés (car je commence tout doucement à manquer de protéines).

Le soir venu, alors que nos voisins de table semblent affamés (en effet les portions sont assez minces, ils n’hésitent pas à chourer aux autres quelques rabes de steak semelle ou de cuisses de poulet), je découvre alors notre plat de niébé qui manque un peu de légumes. Malheureusement, cela va se solder en cuisant échec : les haricots n’ont visiblement pas été assez cuits, et comble, je tombe sur des petits cailloux preuve qu’ils n’ont pas été correctement rincés (de base on doit faire tremper les haricots toute une nuit donc c’était perdu d’avance).

A mon troisième repas sur cette île, il me tarde déjà de retrouver mes aliments et des plats simples et équilibrés.

Je ne pensais pas que cela pouvait sembler si compliqué de préparer des plats végétaliens sans chichi, mais visiblement les plats binaires comme je les appelle (poulet /frites, riz /poisson, pâtes/steak) sont des références qu’il est difficile de défaire.

Au final nous avons survécu à cette première immersion dans un monde frileux au véganisme, mais clairement je me dis qu’on aurait pu frôler la catastrophe si j’y avais été avec mes enfants.

Même en ayant préparé le terrain à l’avance, on est jamais à l’abri d’un fiasco alimentaire.

La prochaine fois, promis, je gérerai un max en amont, une femme avertie en vaut deux !